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Faux RIB : Quelle est la responsabilité des banques en cas de virement frauduleux ?

Francois Hagege
Fondateur
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Escroquerie au faux RIB : Vos recours contre les banques en cas de fraude

Les escroqueries bancaires liées aux faux relevés d'identité bancaire (RIB) sont devenues de plus en plus fréquentes, en particulier dans les transactions en ligne. L'acheteur, souvent victime de la fraude, se demande légitimement si sa banque aurait dû procéder à des vérifications avant d'autoriser un virement vers un compte frauduleux.

De même, la question de la responsabilité de la banque destinataire des fonds se pose.
Cette analyse se concentre sur la responsabilité des banques émettrices et bénéficiaires dans le cadre d'escroqueries au faux RIB, à la lumière des dispositions légales applicables.

Sommaire

  1. Introduction à l'escroquerie au faux RIB
  2. La responsabilité de la banque émettrice face aux virements frauduleux
  3. La responsabilité de la banque bénéficiaire en cas d'escroquerie au faux RIB
  4. FAQ

Une escroquerie courante dans les transactions en ligne

Les arnaques au faux RIB se multiplient, notamment dans le cadre des transactions en ligne. Ce type de fraude intervient généralement lorsque l’acheteur, souvent attiré par une annonce attrayante sur un site de vente en ligne (comme pour un véhicule, des biens de consommation ou même des services), reçoit un RIB frauduleux.

Ce RIB, présenté comme celui du vendeur légitime, permet à l’escroc de se faire passer pour une personne de confiance. Confiant, l’acheteur procède alors au virement de la somme demandée, pensant conclure la transaction en toute sécurité.

Cependant, une fois le virement effectué, l’escroc disparaît, laissant la victime sans bien acheté et, surtout, sans son argent. L’acheteur, démuni, se retrouve face à une situation où il est difficile, voire impossible, de retracer les fonds.

Les escrocs utilisent souvent des comptes temporaires ou des comptes créés à l’aide de documents d’identité usurpés, rendant l’identification du bénéficiaire pratiquement impossible. De plus, les fonds virés sont rapidement transférés vers d'autres comptes ou même retirés, compliquant encore davantage la récupération de l'argent.

Ce phénomène, devenu malheureusement courant, soulève une question importante : la banque émettrice du virement n’aurait-elle pas dû intervenir en exerçant une vigilance particulière ?

En effet, les banques sont soumises à des obligations légales, notamment celle de surveiller les transactions suspectes ou inhabituelles. Dès lors qu'un client effectue un virement vers un compte litigieux ou qu'il exprime des doutes sur la légitimité d'un RIB, la banque doit-elle se contenter d'exécuter l'ordre de paiement ou doit-elle procéder à des vérifications supplémentaires pour protéger son client ?

La réponse à cette question repose sur le devoir de vigilance imposé aux banques par la législation, en particulier le Code monétaire et financier, qui stipule que les établissements bancaires doivent surveiller les opérations financières pour prévenir toute fraude ou blanchiment d'argent.

Toutefois, la mise en œuvre de ce principe dans le cadre des escroqueries au faux RIB reste un sujet débattu dans la jurisprudence, comme l’illustre l'arrêt rendu par la Cour d’appel de Rennes du 16 avril 2024.

La responsabilité de la banque émettrice

La banque, en tant que mandataire de son client, est soumise à un devoir de vigilance. Ce devoir consiste à vérifier l'authenticité des opérations financières et à s'assurer que le bénéficiaire du virement est bien celui qu'il prétend être.

Toutefois, dans de nombreux cas, les banques se réfugient derrière le principe de non-immixtion, selon lequel elles ne doivent pas s'immiscer dans les affaires de leurs clients. Ce principe est contrebalancé par l'obligation de la banque de protéger les fonds de son client et d'exercer un minimum de vigilance.

Ainsi, selon la jurisprudence récente, la Cour d'appel de Rennes, dans un arrêt du 16 avril 2024 (N°RG 21/05597), a rappelé que la banque émettrice d'un virement pourrait voir sa responsabilité engagée si elle n'a pas procédé aux vérifications nécessaires, notamment lorsque le client a exprimé des doutes sur la fiabilité du RIB ou du site de paiement.

L'obligation de conseil de la banque

L'arrêt de la Cour d'appel met en lumière l'importance de l'obligation de conseil de la banque envers son client. Lorsque le client interroge sa banque sur la fiabilité d'un intermédiaire de paiement ou d'un RIB, celle-ci doit fournir une réponse adéquate ou, à défaut, informer le client qu'elle n'est pas en mesure de vérifier les informations. En l'absence de cette information, la banque peut être tenue responsable de la perte de chance de son client de ne pas procéder au virement frauduleux.

La responsabilité de la banque destinataire

La banque destinataire d'un virement frauduleux n’est pas exempte de toute responsabilité. Elle est soumise à une obligation stricte de vérification de l'identité du titulaire du compte, et ce, avant même l’ouverture dudit compte.

Conformément à l'article R 312-2 du Code monétaire et financier, la banque doit non seulement recueillir les documents d'identité nécessaires (comme une carte d'identité ou un passeport) mais également s'assurer que le titulaire est bien la personne qu'il prétend être.

Ces documents doivent être vérifiés minutieusement pour éviter toute usurpation d’identité, un phénomène malheureusement courant dans les affaires d’escroquerie au faux RIB.

Dans ces cas de fraude, il est fréquemment révélé que les documents utilisés pour l'ouverture des comptes frauduleux sont falsifiés ou usurpés. Par exemple, des copies de pièces d'identité volées ou des justificatifs de domicile falsifiés peuvent être présentés pour créer un compte bancaire sous une fausse identité.

En acceptant ces documents sans vérification approfondie, la banque peut voir sa responsabilité engagée. En effet, l’ouverture d’un compte bancaire sous de telles conditions facilite la réalisation d’opérations frauduleuses, comme les virements basés sur des faux RIB.

Le devoir de vigilance renforcé

Au-delà de l'ouverture du compte, la banque destinataire est tenue d’exercer une vigilance accrue quant au fonctionnement du compte en question. En vertu de son devoir de vigilance, la banque doit surveiller les mouvements financiers inhabituels ou suspectés d’être frauduleux.

Ainsi, lorsque des sommes importantes sont créditées en peu de temps sur un compte bancaire, ou que des virements multiples sont effectués, cela devrait immédiatement alerter la banque sur un potentiel comportement frauduleux.

Une analyse attentive des transactions effectuées sur le compte peut révéler des indices d'irrégularité, comme l'absence d'activités économiques régulières ou l’utilisation du compte pour des transactions atypiques.

Le non-respect de cette obligation de vigilance expose la banque à une responsabilité civile. En effet, si la banque ne réagit pas à ces anomalies évidentes, elle peut être tenue responsable des conséquences financières que subit la victime du virement frauduleux.

En manquant à son devoir de surveillance, la banque contribue indirectement à la perpétuation de la fraude, car elle permet à l’escroc de transférer et de retirer les fonds sans que des mesures correctives soient prises.

La jurisprudence a, à plusieurs reprises, reconnu que la négligence de la banque bénéficiaire dans la gestion de comptes frauduleux peut engager sa responsabilité, en particulier lorsqu'elle n’a pas exercé une vigilance suffisante sur les mouvements financiers suspects.

Ainsi, la Cour d'appel de Rennes, dans l'arrêt précité, a rappelé que la banque bénéficiaire, tout comme la banque émettrice, a une obligation légale de protéger les victimes de fraudes bancaires, en exerçant un contrôle strict sur l'identité de ses clients et en surveillant attentivement les transactions effectuées sur leurs comptes.

Conclusion

Face à la prolifération des escroqueries au faux RIB, il est impératif que les établissements bancaires exercent un contrôle rigoureux à chaque étape d'une transaction financière.

Que ce soit la banque émettrice ou la banque bénéficiaire des fonds, leur responsabilité peut être engagée si elles manquent à leurs obligations de vigilance et d'information. Pour les victimes de telles fraudes, se retourner contre leur banque pourrait constituer une solution pour obtenir réparation de leur préjudice, à défaut de pouvoir identifier les auteurs de l'escroquerie.

FAQ

1. Qu'est-ce qu'une escroquerie au faux RIB et comment fonctionne-t-elle ?
Une escroquerie au faux RIB survient lorsqu'un fraudeur fournit un faux relevé d'identité bancaire (RIB) pour recevoir des virements sous de fausses prétentions. Souvent, la victime effectue un virement en pensant acheter un bien (comme un véhicule ou un service) auprès d'un vendeur légitime. Le fraudeur utilise généralement des comptes créés sous de fausses identités ou des comptes temporaires, rendant difficile la récupération des fonds une fois le virement effectué. Cette méthode est courante dans les transactions en ligne et constitue un piège pour les acheteurs qui font confiance aux vendeurs sans pouvoir vérifier leur identité réelle.

2. La banque émettrice peut-elle être tenue responsable en cas de virement sur un faux RIB ?
Oui, la banque émettrice peut voir sa responsabilité engagée si elle n’a pas respecté son devoir de vigilance. Ce devoir consiste à vérifier la légitimité de l’opération, surtout si son client exprime des doutes sur la fiabilité du RIB ou du bénéficiaire. La banque doit également informer son client si elle n'est pas en mesure de garantir la sécurité de la transaction. En cas de manquement à ce devoir, la banque peut être tenue de rembourser tout ou partie des fonds perdus, comme l'a rappelé la Cour d'appel de Rennes dans une affaire de 2024. La perte de chance pour la victime de ne pas procéder à l'opération frauduleuse peut ainsi être indemnisée.

3. Quelles sont les obligations légales de la banque bénéficiaire en matière de vérification d'identité ?
La banque bénéficiaire est soumise à l'obligation de vérifier l’identité du titulaire du compte avant son ouverture. Selon l’article R 312-2 du Code monétaire et financier, elle doit collecter des documents officiels (carte d’identité, passeport, justificatif de domicile, etc.) et s'assurer de leur authenticité. En cas d'usurpation d'identité ou de présentation de documents falsifiés, la banque est responsable si elle n'a pas pris les précautions nécessaires. Le manquement à cette obligation peut entraîner la responsabilité civile de la banque, car elle facilite indirectement l'escroquerie en permettant l’ouverture d’un compte frauduleux.

4. La banque peut-elle refuser d’effectuer des vérifications avant un virement ?
La banque ne peut pas refuser catégoriquement de procéder à des vérifications lorsque son client manifeste des doutes ou demande expressément une confirmation sur la fiabilité d’un intermédiaire de paiement ou d'un RIB. Si elle refuse ou minimise la demande du client, elle peut être accusée de manquement à son obligation de conseil et d'information. La banque a une responsabilité d’informer clairement son client si elle n’est pas en mesure de vérifier les informations ou si elle juge l’opération risquée. Un tel manquement pourrait justifier une indemnisation en cas de perte financière pour le client.

5. Quelles sont les sanctions en cas de non-respect par la banque de son devoir de vigilance ?
En cas de non-respect du devoir de vigilance, la banque peut être condamnée à indemniser son client pour le préjudice financier subi. Dans une affaire récente, la Cour d'appel de Rennes a condamné la banque émettrice à rembourser 90 % du montant du virement frauduleux, considérant que le client avait pris la précaution d'interroger sa banque avant l'opération. De même, la banque bénéficiaire peut être tenue responsable si elle n'a pas vérifié l'identité du titulaire du compte, surtout lorsque le fonctionnement du compte présente des anomalies évidentes. Les sanctions peuvent inclure le remboursement des fonds et des dommages et intérêts pour le préjudice moral et financier subi.

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