La facturation de l’eau potable repose sur un principe simple : l’abonné paie en fonction de sa consommation mesurée par un compteur individuel ou collectif. Pourtant, de nombreux usagers découvrent avec stupeur une facture anormalement élevée, sans avoir modifié leurs habitudes.
Fuite invisible, compteur défectueux, erreur de relevé ou surfacturation injustifiée peuvent en être la cause. Face à une telle situation, le droit français prévoit des recours clairs et accessibles. Entre obligation d’information du fournisseur, droits à la vérification et possibilité de contestation en justice, le consommateur n’est pas sans défense.
Encore faut-il connaître les règles applicables et agir dans les délais impartis pour faire valoir ses droits. Le présent article vous éclaire sur les droits fondamentaux du consommateur en matière de facturation d’eau et les recours juridiques mobilisables en cas de litige.
Conformément à l’article L2224-12-4 du Code général des collectivités territoriales, lorsqu’une consommation excessive est détectée, le fournisseur d’eau a l’obligation légale d’en informer son abonné sans délai. Ce devoir d'information vise à permettre au consommateur de détecter rapidement une éventuelle fuite ou une anomalie technique.
L’information doit intervenir dès que le volume facturé excède le double de la consommation moyenne enregistrée pour ce logement au cours des trois dernières années, ou en cas de dépassement significatif comparé à des logements similaires.
⚖️ Référence légale : CGCT, art. L2224-12-4, issu de la loi n°2011-525 du 17 mai 2011.
Le décret n°2012-1078 du 24 septembre 2012 précise que l’abonné n’est pas redevable de la surconsommation lorsque celle-ci provient d’une fuite située après le compteur, sous réserve qu’il fournisse dans un délai d’un mois :
Cette mesure a été adoptée pour éviter que des fuites non visibles (sous dalle, mur, terrain...) ne pèsent indûment sur l’abonné, dès lors qu’il agit de bonne foi et dans un délai raisonnable.
Une consommation d’eau est présumée anormale dans deux hypothèses principales :
Dans ces cas, le consommateur peut exiger une vérification, voire contester la facturation si aucune explication ne justifie cet excès.
Le service des eaux doit alerter immédiatement l’abonné, par écrit ou par tout autre moyen de communication (SMS, email, courrier postal). À défaut d’information, la responsabilité du fournisseur peut être engagée, notamment sur le fondement de l’article L.121-20-3 du Code de la consommation (défaut de fourniture conforme au contrat).
Si la fuite d’eau est localisée après le compteur, la loi offre une protection renforcée au consommateur :
Cette disposition repose sur un principe de bonne foi : l’abonné n’a pas à supporter une charge excessive s’il agit rapidement et coopère.
Le consommateur peut demander, dans un délai d’un mois à compter de la réception de la facture, une vérification du bon fonctionnement du compteur.
Si le compteur présente un dysfonctionnement avéré, le fournisseur devra :
Dans le cas où le compteur est déclaré conforme mais que le consommateur dispose d’éléments objectifs remettant en cause sa fiabilité, il peut saisir le juge pour demander une expertise judiciaire.
Dans un arrêt du 3 février 1998 (CA Rennes), la cour a jugé que les enregistrements du compteur ne constituent qu’un commencement de preuve. Ainsi, le juge peut accueillir la contestation s’il existe des indices sérieux de surévaluation :
Le réseau avant compteur relève du gestionnaire du service public d’eau potable. Par conséquent :
Dans ce cas, le litige peut être réglé par une mise en demeure, voire par un recours devant le juge administratif si le fournisseur est une collectivité publique.
La procédure impose une tentative préalable de règlement amiable, conformément à l’article L.612-1 du Code de la consommation.
L’usager doit :
Le médiateur émet un avis dans un délai de 90 jours à compter de la saisine.
En cas d’échec de la médiation, l’abonné peut :
Il est possible d’agir sans avocat, par requête au greffe, en exposant clairement les faits, les pièces à l’appui, et les demandes (réduction, remboursement, indemnisation).
Le volume d’eau gaspillé est souvent sous-estimé par les abonnés. Or, une simple chasse d’eau défectueuse peut entraîner une perte de 220 m³ d’eau par an, soit environ 600 € selon les tarifs moyens.
Un robinet qui goutte, à raison d’une goutte par seconde, peut atteindre 35 m³ d’eau perdue chaque année. Ces chiffres illustrent la gravité économique et écologique d’une fuite, aussi minime semble-t-elle.
La réception d’une facture d’eau inattendue et disproportionnée n’est pas une fatalité. La loi encadre strictement les obligations du fournisseur, tout en protégeant l’abonné contre les abus et dysfonctionnements techniques.
En cas de consommation anormale, qu’elle soit due à une fuite, une erreur de mesure ou un défaut du compteur, le consommateur peut faire rectifier ou annuler la facture sous conditions, à la lumière notamment de l’article L2224-12-4 du CGCT et du décret de 2012. Encore faut-il agir dans les délais et apporter des preuves solides : attestation de réparation, demande de vérification, relevés comparatifs.
Si les démarches amiables échouent, le recours au juge reste une voie ouverte pour faire trancher le litige. La vigilance, la réactivité et la bonne connaissance de ses droits sont les clés pour se prémunir contre une facturation abusive et rétablir l’équilibre contractuel entre usager et distributeur.
Une consommation d’eau est dite "anormale" lorsque le volume facturé est supérieur au double de votre consommation moyenne sur les trois dernières années, conformément à l’article L2224-12-4 du Code général des collectivités territoriales. Il peut aussi s’agir d’une consommation anormale par rapport à des logements similaires situés dans la même zone (même surface, même nombre d’occupants). Ce seuil déclenche une obligation d'information du fournisseur, qui doit vous alerter sans délai. À défaut, sa responsabilité contractuelle peut être engagée.
Si la fuite est située après le compteur, vous pouvez être exonéré du paiement de la surconsommation, sous conditions. Le décret n°2012-1078 du 24 septembre 2012 prévoit que l’abonné doit :
Lorsque ces documents sont fournis dans les délais impartis, le fournisseur ne peut facturer la partie excédentaire de la consommation. Cette exonération vise à protéger le consommateur de frais abusifs, tant que celui-ci agit de bonne foi et avec diligence.
Oui, même en l’absence de fuite, il est possible de contester une facture d’eau excessive. Vous pouvez d’abord demander une vérification du compteur par le fournisseur dans un délai d’un mois après réception de la facture. Si un dysfonctionnement du compteur est détecté, la consommation enregistrée ne peut vous être imputée. Et si le fournisseur conclut que le compteur est conforme, vous pouvez apporter la preuve contraire par tout moyen (témoignages, consommation habituelle, logement vacant...).
La jurisprudence reconnaît que les enregistrements du compteur n’ont pas valeur de preuve absolue. Par exemple, dans un arrêt de la cour d’appel de Rennes du 3 février 1998, la justice a donné raison à un abonné qui avait apporté des éléments sérieux mettant en doute les relevés fournis.
Vous disposez de 30 jours à compter :
pour entreprendre plusieurs actions :
Passé ce délai, le fournisseur peut exiger le paiement de la totalité de la facture. Il est donc essentiel d’agir rapidement afin de préserver ses droits. Ce délai figure expressément dans le décret de 2012.
En cas de refus ou d’absence de réponse du service des eaux après réclamation écrite, vous pouvez engager une procédure :
Ce juge est compétent pour ordonner la réduction ou l’annulation de la facture, voire accorder des dommages-intérêts. La procédure est gratuite et sans avocat obligatoire. Il est recommandé de joindre toutes les preuves : factures antérieures, courriers, attestation de fuite, relevés comparatifs, photos, témoignages.