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Télétravail et accident : Comment ça marche

Jordan Alvarez
Editeur
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Accident en télétravail : vos recours

Avec l'essor du télétravail, une nouvelle problématique émerge concernant la reconnaissance des accidents du travail dans ce cadre spécifique. Bien que les salariés en télétravail bénéficient, en principe, des mêmes protections que ceux travaillant sur site, la question de l'imputabilité d'un accident peut devenir complexe lorsque celui-ci survient en dehors des heures ou du lieu prévu pour l’exercice de leurs fonctions.

La présomption légale qui facilite la reconnaissance d'un accident comme étant lié à l'activité professionnelle est donc soumise à des critères rigoureux. Cet article explore les situations où la présomption d’accident du travail ne s’applique pas en télétravail et les obligations du salarié en termes de preuve.

Sommaire

  1. Introduction
  2. Définition légale de l'accident du travail en télétravail
  3. Quand la présomption d’imputabilité ne s’applique pas
  4. Application stricte des critères de lieu et de temps
  5. La charge de la preuve pour le salarié
  6. Conséquences d’un refus de reconnaissance d’accident du travail
  7. FAQ

Les critères légaux de l'accident de travail en télétravail

Selon l'article L 411-1 du Code de la sécurité sociale (CSS), un accident est considéré comme professionnel s'il survient par le fait ou à l'occasion du travail, peu importe la cause ou les circonstances. Cette définition s'applique également aux salariés en télétravail, une forme de travail à distance qui, aujourd'hui, est largement encadrée par le Code du travail.

Le télétravail, formalisé par l'article L 1222-9 du Code du travail, permet à un salarié d'exercer ses fonctions en dehors de l'entreprise, généralement depuis son domicile ou un autre lieu convenu avec l'employeur. Le télétravailleur bénéficie des mêmes protections que tout autre salarié en cas d'accident, avec cependant certaines spécificités.

Un accident survenu dans le cadre du télétravail bénéficie d’une présomption d’imputabilité. Cela signifie qu'un accident se produisant sur le lieu de télétravail, pendant les heures de travail, est présumé être un accident du travail. Cette présomption est une protection juridique importante pour les salariés en télétravail, mais elle n'est pas absolue. En effet, dans certaines situations, cette présomption peut être écartée si les conditions du télétravail ne sont pas respectées.

Dans ce cas, c'est au salarié d’apporter la preuve que l'accident est directement lié à son activité professionnelle. Cette exigence de preuve s'applique particulièrement lorsque l'accident survient en dehors des heures définies ou en dehors du lieu spécifié pour l'exercice du télétravail.

Quand la présomption d’imputabilité ne s’applique pas

La présomption d’imputabilité ne s’applique pas de manière systématique pour les accidents survenant lors du télétravail. En effet, pour que cette présomption joue en faveur du salarié, il est impératif que l'accident survienne pendant les heures de travail et sur le lieu spécifiquement désigné pour l'exercice du télétravail, généralement le domicile du salarié ou tout autre lieu défini avec l’employeur.

Conditions de lieu et de temps : des critères stricts

Lorsque ces deux critères — temps de travail et lieu d’exercice — ne sont pas respectés, la présomption d’accident du travail tombe. Autrement dit, si l’accident se produit en dehors des heures contractuelles ou dans un lieu autre que celui convenu pour le télétravail (par exemple, si le salarié se trouve chez un ami ou dans un café sans accord préalable), l'accident ne sera pas automatiquement pris en charge au titre des accidents du travail.

C’est alors au salarié de prouver que l’accident est directement lié à son activité professionnelle. Cette charge de la preuve est souvent difficile à assumer car elle nécessite des éléments tangibles, comme des témoignages, des documents ou d’autres preuves objectives. De simples déclarations ou des suppositions ne suffisent pas.

Exemple d’exclusion de la présomption d’imputabilité : la jurisprudence

Les décisions récentes des cours d’appel de La Réunion (arrêt du 4 mai 2023) et d'Amiens (arrêt du 15 juin 2023) illustrent bien l’application stricte de cette règle. Dans l’affaire jugée à La Réunion, une salariée, en situation de télétravail, a été victime d’une chute dans les escaliers à son domicile après avoir quitté son poste de travail à 16 h 02.

Toutefois, l'accident n’a été signalé à l’employeur qu’à 17 h 33, avec une hospitalisation intervenue à 17 h 50. La cour a estimé que l'accident s’était produit en dehors des heures de travail, et donc en dehors du cadre professionnel, écartant ainsi la présomption.

Dans l’affaire jugée par la cour d’appel d'Amiens, le salarié en télétravail avait quitté son domicile après sa journée de travail pour se rendre à une activité personnelle. L’accident s’étant produit après ses heures de travail, la cour a conclu que l'accident ne pouvait pas être pris en charge au titre des accidents du travail, et a également écarté la présomption.

La charge de la preuve : un fardeau pour le salarié

En l’absence de présomption, le salarié doit alors démontrer que l’accident est survenu par le fait ou à l’occasion du travail. Cette preuve doit être établie de manière rigoureuse. Par exemple, si un accident survient à un moment où le salarié n’était pas en train de travailler ou qu'il n'est pas situé sur le lieu prévu pour l’exercice du télétravail, il devra prouver que cet événement a un lien direct avec son activité professionnelle.

La charge de la preuve peut inclure des éléments tels que :

  • Des témoignages de collègues ou d’autres personnes présentes au moment de l’accident.
  • Des documents officiels ou des échanges électroniques (emails, messages) attestant que le salarié était effectivement en train de travailler au moment de l’accident.
  • Des rapports médicaux ou certificats précisant l’heure et le contexte de l’accident.

Limites de la présomption : une protection conditionnée

La jurisprudence récente montre clairement que la présomption d’imputabilité en matière de télétravail n’est pas une protection absolue. Elle est strictement conditionnée par le respect des critères de temps et de lieu.

Cela signifie que même si un accident survient pendant une journée de télétravail, si cet accident a lieu en dehors des heures prévues ou dans un autre lieu, le télétravailleur ne pourra pas bénéficier de la présomption légale.

Cela met en lumière l’importance pour les télétravailleurs de bien respecter les conditions d’exercice définies dans leur contrat ou par leur employeur. Une attention particulière doit être portée à la gestion des heures de travail, ainsi qu’au lieu où le télétravail est pratiqué.

En cas de doute ou de non-respect de ces critères, le salarié risque de se voir refuser la reconnaissance de son accident comme un accident du travail, ce qui peut avoir des conséquences importantes sur sa prise en charge par la sécurité sociale.

Application stricte des critères de lieu et de temps

Dans l'affaire jugée par la cour d’appel de La Réunion, une salariée en télétravail a affirmé s’être blessée après avoir quitté son poste de travail à 16 h 02. Cependant, les éléments de preuve soumis à l’examen de la cour ont révélé que l’employeur n’avait été informé de l’accident qu’à 17 h 33, soit plus d’une heure après l’heure prétendue de la blessure, et que l’hospitalisation était intervenue à 17 h 50.

Ces éléments ont conduit la cour à conclure que l'accident n'avait pas eu lieu pendant les heures de travail définies par l’accord de télétravail. En conséquence, la cour a écarté la présomption d’imputabilité, estimant que les critères de temps n'étaient pas remplis.

De manière similaire, la cour d’appel d’Amiens a examiné une situation où un télétravailleur avait quitté son domicile après avoir terminé sa journée de travail pour une activité personnelle.

L’accident survenu après son départ a eu lieu en dehors des heures de travail, ce qui a conduit la cour à refuser de reconnaître cet événement comme un accident du travail. En effet, la présomption d’imputabilité ne pouvait pas s'appliquer dès lors que l'accident s'était produit en dehors du cadre strict du télétravail.

Ces affaires montrent bien que les critères de lieu et de temps sont interprétés de manière rigoureuse par les juges.

Même si l'accident survient lors d'une journée de télétravail, s'il intervient en dehors des heures fixées ou dans un lieu autre que celui convenu pour l'exercice du télétravail, la présomption légale ne s’applique plus. Cela impose au salarié d’apporter des preuves supplémentaires pour établir un lien direct entre l'accident et son activité professionnelle, sans quoi la prise en charge par la sécurité sociale sera refusée.

La charge de la preuve pour le salarié

Lorsque la présomption d’accident du travail est écartée, il incombe au salarié de démontrer que l'accident est bien survenu dans le cadre de son activité professionnelle. Cette exigence s’avère particulièrement stricte, car la simple déclaration de la victime ne suffit pas pour établir ce lien. Le salarié doit fournir des preuves solides, basées sur des éléments objectifs et concrets.

Types de preuves acceptées

Pour que la reconnaissance de l’accident du travail soit validée, le salarié doit appuyer sa demande par des éléments tangibles, tels que :

  • Témoignages de collègues ou de personnes présentes au moment de l’accident, confirmant que l'accident s’est produit dans le cadre professionnel.
  • Documents écrits comme des échanges d'emails ou des messages prouvant que l'accident a eu lieu pendant l'exercice des tâches professionnelles.
  • Rapports médicaux ou certificats indiquant l’heure précise de l’accident et corroborant les faits rapportés par le salarié.

Ces preuves doivent établir un lien direct entre l'accident et l'activité professionnelle du salarié.

Par exemple, si l'accident survient à un moment où le salarié était censé travailler, mais qu'il n'était pas sur son lieu de télétravail ou qu'il ne respectait pas les horaires, la demande peut être rejetée. Les documents fournis doivent donc prouver que l’accident est bien intervenu dans le cadre du télétravail, pendant le temps de travail et dans le lieu défini.

Conséquences d'un manque de preuves

Faute d’éléments probants, la demande de reconnaissance de l'accident en tant qu’accident du travail sera rejetée.

C’est ce qui s’est produit dans les affaires des cours d’appel de La Réunion et d'Amiens, où les télétravailleurs n’ont pas réussi à apporter des preuves suffisantes pour établir que leurs accidents étaient directement liés à leur travail.

Dans ces cas, les juges ont écarté la présomption d’imputabilité, obligeant les salariés à prouver le caractère professionnel de l’accident. En l'absence de preuves concrètes, les tribunaux ont décidé que les accidents n'étaient pas survenus dans le cadre professionnel et, par conséquent, ne pouvaient pas être pris en charge par la sécurité sociale.

Importance de la rigueur

Cette jurisprudence démontre que le salarié doit être particulièrement rigoureux en ce qui concerne la déclaration d’accident dans le cadre du télétravail. Il est essentiel de respecter les horaires de travail et de télétravailler depuis le lieu convenu avec l’employeur, afin de bénéficier de la protection légale en cas d’accident.

En cas de litige, le salarié devra prouver le caractère professionnel de l’accident avec des éléments de preuve solides pour espérer obtenir la reconnaissance d’un accident du travail.

Conclusion

En résumé, la reconnaissance d'un accident du travail en télétravail repose sur des critères stricts, notamment le respect du lieu et du temps de travail. Si ces critères ne sont pas remplis, la présomption d’imputabilité est écartée, obligeant le salarié à apporter des preuves tangibles pour établir le lien avec son activité professionnelle.

Sans ces éléments, la prise en charge par la sécurité sociale est compromise, comme le montrent les récents arrêts des cours d'appel. Il est donc essentiel pour les télétravailleurs de respecter les conditions définies avec leur employeur et d’être vigilants en matière de déclaration d’accident.

FAQ

1. Qu'est-ce qu'un accident du travail en télétravail ?
Un accident du travail en télétravail est un événement soudain et imprévu qui survient par le fait ou à l'occasion du travail, même si l'employé n'est pas physiquement présent dans les locaux de l'entreprise. Selon l'article L 411-1 du Code de la sécurité sociale (CSS), tout accident lié au travail, qu'il ait lieu sur site ou à domicile dans le cadre du télétravail, est considéré comme un accident du travail. Pour bénéficier de cette qualification, l'accident doit survenir pendant l'exercice des activités professionnelles du salarié, et dans un lieu préalablement défini avec l'employeur.

2. Dans quelles conditions la présomption d’imputabilité s’applique-t-elle en télétravail ?
La présomption d’imputabilité s’applique automatiquement lorsqu'un accident survient pendant les heures de travail et dans le lieu désigné pour le télétravail. Ce lieu est généralement le domicile du salarié ou un autre espace convenu avec l'employeur. Si l’accident survient dans ces conditions, il est présumé être lié à l'activité professionnelle, sans que le salarié ait à prouver un lien direct avec son travail. Toutefois, cette présomption est limitée à ces critères précis. Toute dérogation au cadre spatial ou temporel du télétravail écarte cette présomption, et l'accident ne sera pas automatiquement reconnu comme étant de nature professionnelle.

3. Que se passe-t-il si l'accident survient hors des heures ou du lieu de travail ?
Si l'accident survient en dehors des horaires contractuels ou hors du lieu de télétravail défini, la présomption d’imputabilité ne s’applique plus. Le salarié doit alors démontrer que l'accident est directement lié à son activité professionnelle. Par exemple, si l'accident survient à la fin de la journée de travail alors que le salarié a déjà quitté son poste ou dans un lieu non autorisé par l'employeur, la prise en charge au titre de l'accident du travail peut être refusée. Le salarié doit fournir des éléments de preuve concrets prouvant que l'accident est survenu dans le cadre de son activité de télétravail, faute de quoi la sécurité sociale n'accordera aucune prise en charge.

4. Comment un salarié peut-il prouver le lien entre l'accident et son travail en l'absence de présomption ?
Lorsqu'il n'y a pas de présomption d’imputabilité, la charge de la preuve incombe au salarié. Il doit démontrer que l'accident est bien survenu à cause ou à l’occasion de son travail. Pour cela, plusieurs types de preuves peuvent être apportées :

  • Emails ou communications professionnelles prouvant que le salarié était encore en train de travailler au moment de l’accident.
  • Témoignages de collègues ou d'autres personnes ayant connaissance de l'accident et des circonstances dans lesquelles il s'est produit.
  • Rapports médicaux indiquant précisément les circonstances et l’heure de l’accident.
  • Documents d'entreprise montrant que le salarié était en mission ou en activité professionnelle au moment de l'accident.

Sans ces preuves, il sera difficile pour le salarié d'obtenir la reconnaissance de l'accident comme un accident du travail, ce qui peut compromettre sa prise en charge par la sécurité sociale.

5. Quelles sont les conséquences d’un refus de reconnaissance d’accident du travail en télétravail ?
Si l'accident n'est pas reconnu comme un accident du travail, les conséquences pour le salarié peuvent être significatives. Il ne pourra pas bénéficier de la couverture offerte par la sécurité sociale, ce qui inclut :

  • Le remboursement des frais médicaux liés à l'accident.
  • Le versement d'indemnités journalières pour compenser la perte de salaire en cas d'incapacité temporaire de travail.
  • Le paiement d'une rente d'invalidité si l'accident entraîne une incapacité permanente.

Le salarié devra alors couvrir lui-même ses frais médicaux et pourra ne pas percevoir d’indemnisation pour son arrêt de travail. En outre, le refus de prise en charge peut compliquer le retour à l'emploi en cas d'accident grave, notamment si une incapacité partielle ou totale empêche le salarié de reprendre ses fonctions. Cela met en exergue l'importance de bien préparer les preuves nécessaires dès le début pour faire valoir ses droits.

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