Travail

Travail dissimulé : Quels recours ?

Estelle Marant
Collaboratrice
Partager

Le travail dissimulé : Comment ça fonctionne ?

Sommaire

  1. Définition du travail dissimulé par "dissimulation d'emploi salarié"
  2. Particularités et précautions
  3. Sanctions du travail dissimulé
  4. Statut de la victime

Définition du travail dissimulé par "dissimulation d'emploi salarié"

Le travail dissimulé, aussi appelé travail au noir, travail non-déclaré ou clandestin, est une infraction définie par l'article L8221-5 du Code du travail.

Cet article dispose que le travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié se caractérise par plusieurs comportements intentionnels de l'employeur :

  • Omission de la déclaration préalable à l'embauche : Il s'agit du fait pour l'employeur de ne pas effectuer la déclaration obligatoire d'embauche auprès des organismes compétents avant la prise de fonction du salarié. Cette déclaration permet notamment de garantir la couverture sociale du salarié dès le début de son activité.
  • Non-délivrance d'un bulletin de paie ou délivrance d'un bulletin de paie mentionnant un nombre d'heures inférieur à celui réellement accompli : Un employeur qui ne remet pas de bulletin de paie à son salarié, ou qui sous-évalue le nombre d'heures travaillées sur ce document, cache intentionnellement une partie de l'activité du salarié, ce qui a des conséquences sur les droits sociaux de ce dernier.
  • Non-déclaration des salaires ou des cotisations sociales auprès des organismes compétents ou de l'administration fiscale : Cette pratique consiste à ne pas déclarer les rémunérations versées aux salariés, empêchant ainsi le versement des cotisations sociales et fiscales. Cela prive les salariés de leurs droits à la retraite, à l'assurance maladie, et à d'autres prestations sociales.
Intentionnalité et appréciation des juges

Les juges adoptent une approche très stricte en matière d'intentionnalité.

Selon la jurisprudence, l'oubli ou l'erreur ne sont presque jamais retenus pour excuser l'employeur.

La Cour de cassation, dans un arrêt du 20 janvier 2015 (Chambre sociale, n°14-80.532), a rappelé que l'intentionnalité se présume dès lors que les faits de dissimulation sont établis. Ainsi, il incombe à l'employeur de prouver l'absence d'intention frauduleuse, ce qui est très difficile dans la pratique.

Particularités et précautions

Absence de contrat écrit

Lorsque l'employeur ne fournit pas de contrat de travail écrit, le salarié est automatiquement considéré comme étant en CDI à temps plein.

Cette présomption légale vise à protéger les droits des salariés en l'absence de documentation formelle. Cependant, l'absence de contrat écrit ne constitue pas à elle seule une preuve suffisante de travail dissimulé.

Pour caractériser un tel délit, il est nécessaire de démontrer l'intentionnalité de l'employeur à ne pas déclarer l'emploi ou à ne pas respecter les obligations légales.

En cas de doute sur la régularité de sa situation, le salarié dispose de plusieurs options pour vérifier sa déclaration. Il peut contacter les organismes suivants :

  • URSSAF : Union de Recouvrement pour la Sécurité Sociale et les Allocations Familiales, qui gère les cotisations sociales des entreprises.
  • Pajemploi : Service de l'URSSAF dédié aux parents employeurs d'assistantes maternelles et de gardes d'enfants à domicile.
  • Cesu : Chèque emploi service universel, utilisé pour déclarer les employés à domicile.
  • CNAV : Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse, responsable des retraites des salariés du secteur privé.

Ces organismes peuvent confirmer si l'employeur a correctement déclaré le salarié et s'il verse toutes les cotisations sociales requises.

Faux statuts

Certains travailleurs, prétendument indépendants, sont en réalité des salariés.

Cette situation est souvent qualifiée de "faux indépendants".

La jurisprudence considère qu'un travailleur indépendant peut demander la requalification de sa relation de travail en contrat de travail salarié.

Si le juge accède à cette demande, il en résulte plusieurs conséquences importantes pour l'employeur :

  1. Rétroactivité de la relation salariale : Le juge considérera que le travailleur était salarié dès l'origine de la relation de travail.
  2. Formalités d'embauche non respectées : Toutes les formalités liées à l'embauche, telles que la déclaration préalable à l'embauche, n'ont pas été respectées.
  3. Cotisations sociales non versées : L'employeur n'a pas versé les cotisations sociales salariales et patronales.

Outre les faux indépendants, cette situation concerne également les faux stagiaires, faux bénévoles et faux gérants mandataires.

  • Faux stagiaires : Des personnes engagées sous couvert de stages mais exerçant des tâches correspondant à un emploi salarié régulier.
  • Faux bénévoles : Des individus effectuant des travaux habituellement rémunérés, sans contrepartie financière.
  • Faux gérants mandataires : Des travailleurs considérés comme des gérants ou mandataires, mais qui sont en réalité subordonnés comme des salariés.

Sanctions du travail dissimulé

Sanctions civiles

En cas de rupture du contrat de travail, le salarié peut réclamer à son employeur une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, et ce, quelle que soit l'ancienneté du salarié ou le motif de la rupture (Chambre sociale de la Cour de cassation, 25 mai 2005).

Cette indemnité est due de manière systématique et peut se cumuler avec d'autres indemnités liées à la rupture du contrat, telles que l'indemnité de licenciement ou l'indemnité compensatrice de préavis.

De plus, un salarié dont le contrat est en cours peut également demander la régularisation de sa situation en justice.

Cela inclut la reconnaissance de l'ensemble des droits sociaux et salariaux qu'il aurait dû percevoir, comme les cotisations sociales non versées, les congés payés ou les heures supplémentaires.

En outre, le salarié peut réclamer des dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi en raison de cette situation de travail dissimulé.

Ces dommages peuvent couvrir la perte de droits à la retraite, les prestations sociales non perçues, ainsi que tout autre préjudice financier ou moral.

Sanctions pénales

L'employeur reconnu coupable de travail dissimulé risque des sanctions pénales sévères. Selon l'article L8224-1 du Code du travail, les peines encourues sont :

  • Jusqu'à trois ans de prison.
  • Une amende pouvant atteindre 45 000 euros.

Lorsque l'employeur est une société, le montant de l'amende est multiplié par cinq, portant ainsi l'amende maximale à 225 000 euros.

Les peines peuvent être encore plus sévères en présence de circonstances aggravantes, telles que :

  • Le travail dissimulé de mineurs.
  • L'emploi de plusieurs personnes en situation de travail dissimulé.
  • La commission du délit en bande organisée (article L8224-2 du Code du travail).

En outre, des peines complémentaires peuvent être prononcées par le juge. Parmi ces peines, on peut citer :

  • La condamnation à l'affichage de la décision de justice : L'employeur peut être contraint d'afficher la condamnation dans les locaux de l'entreprise ou de la publier dans des journaux (article L8224-3 du Code du travail).
  • L'interdiction d'exercer certaines activités professionnelles.
  • La fermeture temporaire ou définitive de l'établissement.

Statut de la victime

Le salarié est considéré comme une victime de travail dissimulé, même s'il est conscient de sa non-déclaration.

En effet, le législateur et la jurisprudence adoptent une approche protectrice envers les salariés, reconnaissant que ceux-ci peuvent se trouver dans des situations de vulnérabilité ou de dépendance économique les empêchant de refuser un emploi non-déclaré.

Connaissance et fraude

Un salarié ayant connaissance de sa non-déclaration n'est pas automatiquement coupable de complicité. Il demeure une victime à moins qu'il ne soit prouvé qu'il a agi de manière frauduleuse. La fraude suppose une intention délibérée et active du salarié de participer à la dissimulation du travail.

Recours et vérifications

Pour vérifier la régularité de leur situation professionnelle et s'assurer qu'ils sont correctement déclarés, les salariés peuvent contacter plusieurs organismes compétents :

  • URSSAF : Elle gère les cotisations sociales des entreprises et peut confirmer la déclaration d'emploi.
  • Pajemploi : Ce service de l'URSSAF est destiné aux parents employeurs d'assistantes maternelles et de gardes d'enfants à domicile.
  • Cesu : Le Chèque emploi service universel permet de déclarer les employés à domicile et de vérifier leur situation.
  • CNAV : La Caisse Nationale d'Assurance Vieillesse est responsable des retraites des salariés du secteur privé et peut vérifier les cotisations retraite versées par l'employeur.

Ces organismes fournissent des informations essentielles pour s'assurer que toutes les cotisations sociales sont versées correctement et que les droits des salariés sont respectés.

Droits et protections

En étant reconnus comme victimes, les salariés peuvent bénéficier de diverses protections et recours pour faire valoir leurs droits. Ils peuvent demander la régularisation de leur situation et réclamer des indemnités pour le préjudice subi.

La loi et les juges adoptent une approche stricte envers les employeurs qui ne respectent pas leurs obligations légales, garantissant ainsi une protection accrue pour les salariés.

FAQ

Qu'est-ce que le travail dissimulé par "dissimulation d'emploi salarié" ?

Le travail dissimulé, ou travail au noir, est défini par l'article L8221-5 du Code du travail. Il inclut des actions intentionnelles de l'employeur visant à ne pas déclarer un emploi ou à ne pas respecter les obligations légales.

Quels comportements constituent le travail dissimulé ?

Les comportements constitutifs de travail dissimulé incluent l'omission de la déclaration préalable à l'embauche, la non-délivrance d'un bulletin de paie ou la délivrance d'un bulletin mentionnant un nombre d'heures inférieur à celui réellement accompli, ainsi que la non-déclaration des salaires ou des cotisations sociales auprès des organismes compétents ou de l'administration fiscale.

Comment les juges évaluent-ils l'intentionnalité ?

Les juges adoptent une approche stricte en matière d'intentionnalité. L'oubli ou l'erreur ne sont presque jamais acceptés comme excuses. L'intentionnalité se présume dès lors que la dissimulation est prouvée.

Que faire en l'absence de contrat écrit ?

En l'absence de contrat écrit, le salarié est présumé en CDI à temps plein. Cependant, l'absence de contrat écrit ne suffit pas à prouver le travail dissimulé. Pour vérifier sa déclaration, le salarié peut contacter l'URSSAF, Pajemploi, Cesu ou la CNAV.

Quels faux statuts peuvent être requalifiés ?

Certains travailleurs, prétendument indépendants, sont en réalité des salariés. Cette situation concerne également les faux stagiaires, faux bénévoles et faux gérants mandataires. Si le juge accède à la demande de requalification, cela entraîne une rétroactivité de la relation salariale, l'absence de formalités d'embauche respectées et le non-versement des cotisations sociales.

Quelles sont les sanctions civiles ?

En cas de rupture du contrat de travail, le salarié peut réclamer une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire, due quelle que soit l'ancienneté du salarié ou le motif de la rupture. Cette indemnité peut se cumuler avec d'autres indemnités liées à la rupture du contrat et des dommages et intérêts pour le préjudice subi.

Quelles sont les sanctions pénales ?

L'employeur reconnu coupable de travail dissimulé risque jusqu'à trois ans de prison et une amende pouvant atteindre 45 000 euros. Lorsque l'employeur est une société, l'amende peut être multipliée par cinq. Les peines peuvent être plus sévères en présence de circonstances aggravantes et peuvent inclure des peines complémentaires comme l'affichage de la décision de justice ou l'interdiction d'exercer certaines activités professionnelles.

Quel est le statut de la victime ?

Le salarié est considéré comme une victime de travail dissimulé, même s'il a connaissance de sa non-déclaration, à moins qu'il ne soit prouvé qu'il a agi de manière frauduleuse. Pour vérifier leur situation, les salariés peuvent contacter l'URSSAF, Pajemploi, Cesu ou la CNAV. En tant que victimes, les salariés peuvent demander la régularisation de leur situation et réclamer des indemnités pour le préjudice subi. La loi et les juges adoptent une approche stricte envers les employeurs qui ne respectent pas leurs obligations légales, garantissant ainsi une protection accrue pour les salariés.

Articles Récents

Besoin d'aide ?

Nos équipes sont là pour vous guider !

Thank you! Your submission has been received!
Oops! Something went wrong while submitting the form.