Faute inexcusable : quelles conséquences pour l'employeur ?

Jordan Alvarez
Editeur
3 minutes
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Que risque votre employeur en cas de reconnaissance d'une faute inexcusable ? 

La reconnaissance d'une maladie professionnelle, d'un accident du travail, ou d'une faute inexcusable de l’employeur peut avoir des conséquences significatives tant pour le salarié que pour l’employeur. Comprendre ces conséquences est essentiel pour mieux appréhender les droits et obligations de chacun.

Accident du travail et maladie professionnelle : Définitions et Conséquences

La reconnaissance d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle est un processus nécessaire pour assurer la protection du salarié et garantir ses droits en cas d’incident lié à son activité professionnelle.

Définitions :

  1. Accident du Travail :
    Un accident du travail est défini par le Code de la Sécurité Sociale comme un événement soudain survenu par le fait ou à l'occasion du travail, qui entraîne une lésion corporelle ou psychique chez le salarié. Cet accident doit se produire pendant que le salarié est sous l'autorité de son employeur et en lien direct avec son activité professionnelle. Par exemple, une chute, une coupure ou une exposition à des substances dangereuses sur le lieu de travail sont des cas typiques d'accidents de travail.
  2. Maladie Professionnelle :
    Une maladie est présumée professionnelle lorsqu’elle figure sur le tableau des maladies professionnelles annexé au Code de la Sécurité Sociale et qu’elle a été contractée dans les conditions prévues par ce tableau. Ce tableau liste les maladies liées à certaines professions ou à l’exposition à des agents nocifs, ainsi que les délais de prise en charge et les travaux susceptibles de provoquer ces maladies. Par exemple, une affection respiratoire due à l’exposition prolongée à l’amiante est considérée comme une maladie professionnelle. Si une maladie ne figure pas dans ce tableau, elle peut néanmoins être reconnue comme professionnelle si le salarié prouve qu’elle est directement et essentiellement causée par son travail.

Conséquences pour le Salarié :

La reconnaissance d’un accident de travail ou d’une maladie professionnelle ouvre plusieurs droits spécifiques pour le salarié :

Indemnités Journalières : Dès la reconnaissance de l’accident de travail ou de la maladie professionnelle, le salarié a droit à des indemnités journalières versées par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM).

Contrairement aux arrêts maladie classiques, ces indemnités sont versées dès le premier jour d’arrêt de travail, sans délai de carence.

Le montant des indemnités journalières est calculé sur la base du salaire de référence du salarié et est généralement plus avantageux que les indemnités pour un arrêt de travail classique. Ces indemnités sont versées jusqu'à la guérison du salarié ou, en cas de séquelles permanentes, jusqu’à la consolidation de son état de santé, c’est-à-dire le moment où son état est stabilisé.

Rente Viagère ou Indemnité en Capital : En cas d’incapacité permanente causée par l’accident ou la maladie, le salarié peut percevoir une rente viagère ou, selon l'importance de l'incapacité, une indemnité forfaitaire en capital.

La rente viagère est une compensation financière versée à vie, calculée en fonction du taux d'incapacité permanente partielle (IPP) du salarié, de son salaire de référence, et de son âge.

Pour une incapacité permanente partielle inférieure à 10%, une indemnité en capital peut être versée à la place de la rente. Le calcul et le versement de cette rente ou indemnité sont pris en charge par la CPAM, qui évalue le taux d’incapacité et décide de l’allocation.

Frais Médicaux : Tous les frais médicaux en lien direct avec l’accident de travail ou la maladie professionnelle sont pris en charge à 100 % par la caisse d’assurance maladie du salarié.

Cette couverture comprend les consultations médicales, les frais d’hospitalisation, les médicaments, les soins infirmiers, la rééducation, et tout autre traitement nécessaire à la guérison ou à l'amélioration de l'état de santé du salarié. Cette prise en charge totale évite au salarié toute avance de frais et garantit un accès rapide aux soins requis.

Indemnité Complémentaire de l’Employeur : Selon les conventions collectives ou les accords d'entreprise, l'employeur peut être tenu de verser une indemnité complémentaire au salarié dès le premier jour d'absence.

Cette indemnité vient en complément des indemnités journalières versées par la CPAM, et elle vise à compenser la perte de revenus subie par le salarié en arrêt de travail.

Les conditions de versement et le montant de cette indemnité complémentaire varient en fonction des accords en place, mais elle est généralement calculée sur une base de maintien de salaire à hauteur d’un certain pourcentage pendant une période déterminée.

Faute inexcusable de l’employeur : Conséquences Renforcées

La faute inexcusable de l’employeur est une situation particulière où il est démontré que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour le protéger. Lorsqu'une faute inexcusable est reconnue, les conséquences pour l’employeur et le salarié sont amplifiées.

Pour le Salarié :

  1. Majoration de la Rente d’Incapacité ou du Capital : Le salarié peut bénéficier d’une majoration de la rente d’incapacité ou du capital versé en cas d’incapacité totale ou partielle. Conformément à l’article L452-2 du Code de la Sécurité Sociale, cette majoration ne peut excéder le montant du salaire annuel correspondant à la réduction de la capacité de travail ou le salaire total en cas d’incapacité totale.
  2. Indemnisation Complémentaire des Préjudices : En vertu de l’article L452-3 du Code de la Sécurité Sociale, le salarié a droit à une indemnisation complémentaire couvrant :
    • Les souffrances endurées,
    • Le préjudice esthétique,
    • Le préjudice d’agrément,
    • La perte de chance de promotion professionnelle.
  3. Suite à une décision du Conseil Constitutionnel du 18 juin 2010, d’autres préjudices non couverts forfaitairement peuvent également donner lieu à une indemnisation complémentaire, tels que :
    • Le déficit fonctionnel temporaire,
    • Les frais d’aménagement liés au handicap, incluant par exemple les frais d’aménagement du véhicule,
    • Le préjudice sexuel,
    • Le coût d’une tierce personne avant consolidation de l’état de santé du salarié.
  4. Droit à Indemnisation pour Licenciement Injustifié : La Chambre sociale de la Cour de Cassation a reconnu au salarié, licencié pour inaptitude consécutive à la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, le droit de demander devant le Conseil des Prud’hommes l’indemnisation du préjudice résultant de la perte de son emploi (Cass. Soc., 17 mai 2006).

Pour l’Employeur :

L'employeur qui a commis une faute inexcusable doit faire face à plusieurs obligations :

  1. Remboursement des Sommes Avancées : Bien que la caisse d’assurance maladie indemnise directement le salarié, elle peut se retourner contre l’employeur pour récupérer les sommes avancées.
  2. Cotisation Complémentaire : L’employeur doit également verser une cotisation complémentaire pour couvrir la majoration de la rente d’incapacité du salarié.

La reconnaissance d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle, ou d’une faute inexcusable de l’employeur entraîne des conséquences importantes pour les deux parties.

Pour le salarié, cela ouvre la voie à une indemnisation renforcée et à la prise en charge des soins.

Pour l’employeur, cela représente des coûts additionnels et des obligations renforcées envers le salarié. Il est donc crucial pour chaque employeur de veiller à la sécurité de ses employés pour éviter de lourdes sanctions et pour chaque salarié de connaître ses droits en matière de sécurité au travail.

FAQ :

1. Comment le salarié doit-il déclarer un accident de travail ou une maladie professionnelle ?

Pour déclarer un accident de travail, le salarié doit informer son employeur dans un délai de 24 heures, sauf en cas de force majeure, d'impossibilité absolue ou de motif légitime. L’employeur a ensuite 48 heures pour déclarer l’accident à la CPAM. Pour une maladie professionnelle, le salarié doit adresser à la CPAM une déclaration de maladie professionnelle avec un certificat médical indiquant la nature de la maladie et sa relation avec le travail, ainsi que tous les éléments permettant de justifier cette relation.

2. Que se passe-t-il si l'accident de travail ou la maladie professionnelle n'est pas reconnu par la CPAM ?

Si la CPAM refuse de reconnaître l’accident de travail ou la maladie professionnelle, le salarié a la possibilité de contester cette décision. Il peut d’abord solliciter une commission de recours amiable (CRA) au sein de la CPAM dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision. Si la CRA rejette la contestation, le salarié peut alors saisir le Tribunal judiciaire compétent, en matière de sécurité sociale, pour faire valoir ses droits.

3. Quelle est la différence entre une incapacité temporaire et une incapacité permanente ?

Une incapacité temporaire est une période durant laquelle le salarié est totalement ou partiellement inapte à exercer son travail en raison de l’accident ou de la maladie, mais pour laquelle une amélioration de l’état de santé est attendue. En revanche, une incapacité permanente est constatée lorsque l'état de santé du salarié est stabilisé mais laisse des séquelles irréversibles entraînant une diminution de ses capacités de travail ou de gain. Le salarié reçoit alors une rente ou une indemnité en capital en fonction du taux d’incapacité évalué par un médecin conseil de la CPAM.

4. Quels sont les délais de prescription pour demander la reconnaissance d'une maladie professionnelle ou la faute inexcusable de l’employeur ?

Pour une maladie professionnelle, le salarié dispose de deux ans à compter de la cessation de son travail dans l’entreprise où il a contracté la maladie, ou de la date à laquelle il a été informé de la nature professionnelle de sa maladie, pour faire sa demande. Concernant la faute inexcusable de l’employeur, le salarié ou ses ayants droit disposent également d'un délai de deux ans pour engager une action à compter de l’accident ou de la reconnaissance de la maladie professionnelle.

5. L'employeur peut-il contester la reconnaissance de la faute inexcusable par la CPAM ?

Oui, l'employeur a la possibilité de contester la décision de la CPAM de reconnaître sa faute inexcusable. Cette contestation peut être portée devant le Tribunal judiciaire, section « contentieux général de la sécurité sociale », pour faire valoir ses arguments. L’employeur peut notamment contester la faute inexcusable en démontrant qu’il a respecté toutes les obligations de sécurité et de prévention, et qu'il n’avait pas ou ne pouvait pas avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié.

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